Gabon
Noureddin, le fils de l’ex-président Ali Bongo déclare avoir été victime de tortures
Pour la première fois depuis sa libération en mai dernier, après vingt mois de détention à la suite du coup d’État d’août 2023 contre son père Ali Bongo, Noureddin Bongo Valentin s’est exprimé dans un long entretien accordé à l’hebdomadaire britannique The Standard. Il y dénonce les tortures qu’il aurait subies durant son incarcération.
Rentré auprès de sa famille à Londres fin mai, l’ancien détenu de 33 ans a détaillé au média britannique des sévices qu’il qualifie d’inhumains : passages à tabac, coups dans les parties génitales, ingestion forcée d’alcool, simulation de noyade, décharges électriques, privations alimentaires, cellule sans couchage, alternance de nuits éclairées et de journées dans le noir. Il ajoute avoir vu sa mère frappée et étranglée sous ses yeux. Ces accusations figurent déjà dans une plainte déposée en France en mai 2024 pour séquestration, détention arbitraire, actes de torture et de barbarie. Selon RFI, Noureddin aurait réussi à filmer ses gardiens grâce à des lunettes équipées d’une caméra. Dans une vidéo consultée par The Standard, l’un de ses bourreaux ironise : « Ce passage à tabac, c’est comme du yoga. Si je te torturais vraiment, tu ne tiendrais pas debout. »
Les autorités gabonaises rejettent systématiquement ces accusations. À Libreville, Noureddin Bongo et ses parents font eux-mêmes l’objet de poursuites pour corruption et détournements, des charges qu’il qualifie de « fausses ». « Ce n’est pas ma faute si un tiers des Gabonais vit dans la pauvreté », affirme-t-il, se présentant comme un « bouc émissaire commode ».
Nourri d’une éducation britannique, il a étudié à Eton. Noureddin revendique davantage son identité londonienne que gabonaise. Il assure avoir quitté Londres à contrecœur en 2018 pour répondre à l’appel de son père, affaibli par un AVC et en quête de confiance. Dans la nuit du 30 août 2023, alors qu’il jouait au baby-foot avec des amis, il est arrêté par des militaires et séparé de sa famille. « Vous êtes finis », lui auraient lancé ses gardes.
Pour lui, le coup d’État mené par le général Brice Oligui Nguema relève d’une trahison personnelle. « J’avais totalement confiance en Oligui. Il venait même aux anniversaires de mes enfants. Qu’il ait pu se retourner contre nous et ordonner de violentes tortures contre moi montre que n’importe qui est capable de commettre l’horreur. »
Enfin, Noureddin Bongo livre sa lecture du putsch : selon lui, son père tentait de mettre fin à la corruption, là où Oligui l’aurait relancée. « Regardez de qui il s’est entouré, dit-il. On comprend vite que son objectif n’était pas d’assainir le système, mais de perpétuer les pratiques. »
Martial SEHOMI
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