La faim aiguë a atteint des niveaux sans précédent en 2024. Selon le Rapport mondial sur les crises alimentaires, publié par le Réseau mondial contre les crises alimentaires en collaboration avec l’ONU, l’Union européenne, la Banque mondiale et d’autres partenaires, 295 millions de personnes à travers 53 pays ont souffert de niveaux critiques d’insécurité alimentaire.

Un triste record. Cette hausse de 13,7 millions (Soit une hausse de 8 % des souffrants de la faim dans le monde en 2024) par rapport à 2023 montre la sixième année consécutive de détérioration, ce qui indique la persistance d’un phénomène qui échappe encore à une réponse globale efficace. « Ce rapport est une nouvelle condamnation sans équivoque d’un monde qui a dangereusement dévié de sa trajectoire », a déclaré António Guterres, Secrétaire général des Nations Unies.

Conflits, économie, climat : un triptyque dévastateur

Les conflits armés sont, une fois de plus, identifiés comme le principal moteur de la faim aiguë, touchant à eux seuls 140 millions de personnes dans 20 pays. Des crises humanitaires extrêmes ont été signalées au Soudan, où plus de 755 000 personnes sont désormais en situation de famine ou à son seuil, alors qu'aucun cas n'était recensé en 2023.

Dans un autre registre, les chocs économiques tels que l’inflation galopante, la dévaluation monétaire ou la montée des prix alimentaires ont plongé 59,4 millions de personnes dans l’insécurité, avec des cas critiques en Afghanistan, au Yémen ou encore en Syrie.

Le climat n’est pas en reste. 96 millions de personnes ont été touchées par des événements météorologiques extrêmes (sécheresses, inondations, El Niño), principalement en Afrique australe, en Asie du Sud et dans la Corne de l’Afrique. « Les crises de longue date sont maintenant aggravées par une autre, plus récente : la réduction spectaculaire des fonds humanitaires vitaux pour répondre à ces besoins. Il ne s’agit pas seulement d’une défaillance des systèmes, mais d’une défaillance de l’humanité. La faim au XXIe siècle est indéfendable. Nous ne pouvons pas répondre à des estomacs vides avec des mains vides et des dos tournés », a fait savoir Antonio Guterres.

Une crise des enfants déplacés et malnutris

La situation est d’autant plus alarmante pour les enfants. Le rapport révèle que 38 millions d’enfants de moins de cinq ans ont souffert de malnutrition aiguë sévère. Dans des zones comme la bande de Gaza, le Mali, le Soudan et le Yémen, la malnutrition atteint des pics dramatiques.

Les déplacements forcés sont également en forte hausse. En 2024, 128 millions de personnes ont été déplacées contre leur gré, dont 95 millions dans des pays déjà affectés par des crises alimentaires comme la République démocratique du Congo, la Colombie, la Syrie ou le Soudan du Sud.

Les perspectives pour 2025 sont jugées « sombres » par les auteurs du rapport. Sans une refonte audacieuse de l’approche mondiale de lutte contre l’insécurité alimentaire, qui allie aide humanitaire, résilience locale, investissements durables et paix, la spirale de la faim risque de devenir incontrôlable.